samedi 23 mai 2015

Réseau Sortir du nucléaire : après 5 ans de crise, les évictions de 2010 annulées par la Cour d'appel de Lyon


Samedi 23 mai 2015

Stéphane Lhomme
Administrateur du Réseau Sortir du nucléaire de 2000 à 2002

Salarié du Réseau Sortir du nucléaire de 2002 à 2010
Actuellement Directeur de l'Observatoire du nucléaire



Jeudi 21 mai 2015, devant la Cour d'appel de Lyon, l'éviction du Conseil d'administration du Réseau Sortir du nucléaire, qui a eu lieu en février 2010, a officiellement été déclarée nulle. Simultanément, mon licenciement en avril 2010 a fait l'objet d'un accord le déclarant lui aussi nul et permettant de clore la procédure en cours devant les Prud'hommes. Il s'agit donc de la fin de cinq ans de crise qui ont durablement affaibli le mouvement antinucléaire français, ce qui était d'ailleurs probablement le but de toute cette affaire.


Pour mémoire, lors de son assemblée générale annuelle de février 2010, le Réseau Sortir du nucléaire a été l'objet d'un véritable putsch fomenté par le directeur : s'appuyant sur une fausse grève des salariés travaillant sous sa surveillance au siège de l'association, agitant la menace de la disparition du Réseau en cas de non respect des exigences des "grévistes", il avait contraint l'Assemblée générale à démettre l'ensemble des administrateurs pour les remplacer par d'autres recrutés par lui, dont certains jamais vus dans l'association. Peu de temps après, il me faisait licencier par ces nouveaux administrateurs.


Rapidement, l'engagement militant du Réseau Sortir du nucléaire a été édulcoré : la lutte pour faire fermer au plus vite les réacteurs nucléaire a laissé place à des revendications floues et, surtout, compatibles avec les compromis des notables de l'écologie politique, en quête de strapontins ministériels ou parlementaires.


Pendant 5 ans, des démarches opiniâtres ont été menées pour tenter de rétablir la démocratie dans le Réseau Sortir du nucléaire. Chaque année, des motions demandant l'annulation des évictions de 2010 étaient présentées, mais arbitrairement décrétées "irrecevables". Aussi, en 2012, constatant la persistance de ce blocage arbitraire, trois des administrateurs évincés se sont portés volontaires pour entamer une action en justice civile, pendant que je saisissais simultanément les Prud'hommes.


En 2014, une trentaine de groupes adhérents, parmi les plus actifs sur le terrain, ont initié une démarche démocratique pour condamner le putsch de 2010 et relancer un véritable engagement antinucléaire. Après plusieurs mois de travail collaboratif, cette démarche exemplaire a porté ses fruits lors de l'Assemblée générale de février 2015 avec l'élection de 6 administrateurs (sur 9) porteurs de cette démarche et l'adoption, à plus de 75% de voix, des motions démocratiques proposées.


C'est ainsi que cette triste affaire a pu trouver enfin une issue digne et démocratique ce jeudi 21 mai 2015 devant la Cour d'appel de Lyon. Les textes reconnaissent et dénoncent les agissements de 2010 :



Concernant les anciens administrateurs : "La révocation du Conseil d’Administration du Réseau Sortir du nucléaire lors de l'Assemblée Générale de février 2010 a été basée sur des accusations créées pour la circonstance pendant laquelle ont été utilisées des méthodes (tractations et manoeuvres en coulisse) qui n'étaient ni justifiées, ni acceptables."



Concernant Stéphane Lhomme : "Ce licenciement abusif a été basé sur des accusations créées pour la circonstance et mis en oeuvre suite à l'assemblée générale du Réseau Sortir du nucléaire de février 2010 avant et pendant laquelle ont été utilisées des méthodes (tractations et manoeuvres en coulisse) qui n'étaient ni justifiées, ni acceptables."


Les trois anciens administrateurs se voient attribuer chacun 1500 euros de préjudice (reversés à une caisse de solidarité pour les associations attaquées) et 1500 euros de remboursement des frais de procédure. Pour ma part, outre les indemnités légales (environ 10 000 euros) et le remboursement des frais engagés, je recevrai 37.460 € au titre des "dommages et intérêts".


Cette somme peut sembler importante de prime abord, mais en réalité elle couvre à peine la moitié de ce que j'ai perdu depuis 5 ans (en totalisant les salaires que j'aurais perçus si je n'avais pas été licencié, moins les allocations assedics puis les smics que j'ai perçus). Et je ne suis évidemment pas dédommagé pour ce que je vais perdre à l'avenir, selon le même mode de calcul, ni pour le précarité de ma situation (ces précisions non pour faire pleurer sur mon sort mais parce que de "bonnes âmes" essaient de faire croire que je serais "gagnant" dans cette affaire, ce qui est risible quand on pense à tout ce qu'il a fallu subir pendant 5 ans).


De toute façon, vous le savez, l'argent n'a jamais été ma motivation. J'ai d'ailleurs accepté un étalement des versements jusqu'au premier semestre 2016 afin de ne pas pénaliser le fonctionnement du Réseau Sortir du nucléaire, ou plutôt pour ne pas mettre en difficulté la nouvelle majorité : elle est toujours confrontée à trois administrateurs putschistes et à plusieurs salariés faux-grévistes en 2010, dont le fameux "directateur", toujours en place et occupé à manoeuvrer en coulisse au lieu d'agir contre le nucléaire.


Il est bien difficile de savoir si le Réseau Sortir du nucléaire pourra être remis sur les bons rails mais, dans l'immédiat, il est bien légitime de se réjouir de la bonne nouvelle si longtemps attendue : la nullité officielle et définitive de l'éviction des administrateurs et de mon licenciement survenus en 2010.


Je remercie toutes les personnes qui ont fait part de leur soutien moral, celles qui ont aidé financièrement pour les procédures, et celles qui aident aujourd'hui au financement de l'Observatoire du nucléaire. Ce dernier me permet de toucher un salaire, aussi modeste soit-il, pour combattre l'industrie nucléaire… avec une certaine efficacité comme l'a montré la récente victoire judiciaire contre Areva  (cf informations sur http://www.observatoire-du-nucleaire.org )



Merci encore à toutes et tous.

Stéphane